On connait la musique...

On connait la musique...

Heureux les amusiciens car ils seront libres

Les personnes atteintes d'amusie sont incapables de distinguer les hauteurs des sons, ils ne peuvent pas reconnaître un air et chantent faux (comme Jacky Bernard). Cette pathologie peut être génétique ou provoquée par un traumatisme.

Les « amusiciens » semblent hermétiques à toute production musicale, quelle qu'elle soit. Il y a toutefois des degrés d'atteinte différents : une amusie légère n'empêche pas d'apprécier la musique et d'y d'être sensible, mais en cas d'amusie totale, l'écoute d'une musique est perçue comme une suite de bruits très désagréables. La musique agissant alors comme un phénomène indésirable, repoussant, insensé, l'amusicien échappe à son charme, à son emprise.

L'amusicien ne peut donc jouir des merveilleux plaisirs que procure la musique, la pathologie dont il souffre est considérée comme un handicap.

 

La musique est présente depuis la naissance de l'humanité. Elle est, comme le langage, un élément constitutif de toute société humaine. Instrument de communication, elle participe ainsi à la construction des relations mère-enfant dès la gestation. Objet identitaire, elle est également le marqueur, aussi bien d'une génération, que d'un peuple, d'une culture, d'un combat, d'un mode de vie...

 

La communication musicale n'est pas uniquement un vecteur permettant aux femmes et aux hommes de partager des plaisirs et des émotions, elle est aussi parfois un outil pour manipuler les individus. Elle fait pour cela appel à notre cerveau primitif, celui qui va nous faire suivre sans réfléchir un rythme primaire ou une phrase musicale simple proposé par l'un de nos semblables, nous inciter à nous joindre à cette musique, à la répéter, et faire ainsi corps avec les autres, faire communauté. L'instinct grégaire s'appuie sur la musique.

Ce mécanisme s'exprime dans les hymnes nationaux, les musiques militaires, les chants des stades de foot, des manifestations, etc.

 

Notre langue traduit bien ce côté sombre de la musique. Pascal Quignard (in « La haine de la musique » Folio 3008) nous le rappelle : « Ouïr, c'est obéir. Ecouter se dit en latin obaudireObaudire a dérivé en français sous la forme obéir. L'audition, l'audientia, est une obaudientia, est une obéissance. »

L'homme obéit à la musique, il n'a pas le choix, toute musique accroche notre oreille, nous en devenons les otages, les misérables marionnettes. Ainsi Ulysse dut s'attacher au mât de son bateau pour ne pas succomber au chant des sirènes.

 

Alors, heureux les amusiciens car ils seront libres ! La musique n'a pas de prise sur leur instinct grégaire, ils peuvent s'affranchir des pulsions portées par le son des tambours, le chant des hymnes et des slogans, par le rythme des bottes et des coups de sifflets, ces folies collectives qui nous mènent aux guerres, aux lynchages.

 

Heureux les amusiciens car ils peuvent faire fi des autres, emprunter des chemins de traverse, échapper à l'influence des masses obéissantes pour jouir d'une solitude salvatrice. La solitude des poètes, de la méditation, de la réflexion, l'élixir de félicité des misanthropes. Cette solitude que magnifiait Léo Ferré… en musique !

 



27/05/2019
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